de  Mix Jagger  | 5,0 / 5,0 |  Temps de lecture: 10 min
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Techniques d’enregistrement : le piano - Partie 2 / vignette
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Aujourd’hui, nous continuons d’approfondir notre apprentissage des techniques d’enregistrement dédiées au piano en mettant l’accent sur les configurations de proximité. Avant de commencer, n’hésite pas à lire ou à relire notre article précédent Techniques d’enregistrement : le piano – Partie 1. C’est parti !

Introduction 

Après avoir vu ensemble la meilleure manière d’aborder ta session d’enregistrement (les différents types de micros, l’acoustique du piano et les préparatifs techniques), et avant de commencer à entrer plus en détail dans les pratiques microphoniques, tu devras absolument prendre en compte l’emplacement de l’instrument dans la pièce. En effet, en fonction de sa position dans un espace donné, un piano pourra sonner de manières très diverses.

Mais alors où installer le piano pour obtenir un rendu sonore optimal ? Comme toujours, il n’y a pas de réponse absolue, mais une myriade de possibilités en fonction de ton objectif du moment. Un son brillant, un son feutré, un son très sec etc. Tout dépendra de l’esthétique sonore que tu souhaites obtenir. Cela dit, dans cet article nous partirons du postulat que tu effectueras ton enregistrement dans une pièce close d’une surface relativement standard (entre 10 et 30 mètres carrés). Ainsi avant même de commencer il faudra tenir compte de la distance entre l’instrument et les cloisons. Par exemple, placer le piano contre un mur ou dans un coin risquerait d’amplifier les fréquences basses et médiums de manière outrancière (en raison des réflexions du son direct causées par les murs et le plafond). Mais à l’inverse, un mur situé à quelques mètres du piano pourrait contribuer à éclaircir le son en réfléchissant certaines fréquences aiguës directement vers les micros. N’hésite pas à déplacer l’instrument et à essayer de trouver l’endroit le plus adéquat, qui plaira tant à ton oreille qu’à celle de l’artiste. Entrons maintenant dans le vif du sujet.

Quelle méthode de captation adopter ?

Techniques d’enregistrement : le piano - Partie 2 / Quelle méthode de captation adopter ?

Il existe deux écoles pour capter le son d’un piano : la captation d’ambiance et la captation rapprochée. La captation d’ambiance consiste à capter l’instrument dans une pièce à l’acoustique adaptée, de la manière la plus naturelle possible grâce à des techniques de prise à distance. De nos jours, ce type de captation est généralement utilisée pour les enregistrements de musique classique ou du moins orchestrale. Car l’objectif est ici de recréer pour les auditeur·ices une expérience sonore de concert à domicile, comparable à celle d’une place au premier rang dans un auditorium. Cependant, c’est une méthode très spécifique qui ne fonctionnerait pas dans un contexte de musique « actuelle » (pop, rock, hiphop etc), car il serait quasiment impossible de modifier ou d’atténuer la réverbération de la pièce lors de la phase de mix.

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L’autre solution que nous privilégierons aujourd’hui consiste donc naturellement à opter pour une prise de son de proximité. Et quand on parle de proximité, on veut dire encore plus proche de ce qu’entend le ou la pianiste, en captant au plus près les mécanismes internes de l’instrument. Comme tu t’en doutes, ce type de prise microphonique réduit le niveau d’ambiance de manière drastique (sans l’annuler complètement pour autant), et permet donc d’obtenir des pistes exploitables même dans des espaces d’enregistrement de qualité acoustique médiocre. L’autre intérêt majeur est celui du mix : une prise captée avec le moins d’ambiance possible facilitera grandement l’intégration du son du piano dans un morceau plus complexe.

Paire stéréo espacée A/B

Techniques d’enregistrement : le piano - Partie 2 / Paire stéréo espacée A/B

Une technique courante consiste à utiliser une paire stéréo espacée A/B (deux micros positionnés en parallèle, écartés de plusieurs centimètres). L’un des principaux avantages de cette approche est la possibilité d’utiliser des micros omnidirectionnels, qui offrent des atouts non négligeables en matière de captation des fréquences basses, mais aussi un supplément de fidélité hors axe, contrairement aux micros directionnels (à directivité cardioïde ou hypercardioïde par exemple). Cependant, la technique A/B présente elle aussi son lot d’inconvénients. Premièrement, l’image stéréo produite ainsi aura souvent tendance à être chirurgicale, et on reproche parfois à cette méthode de créer un sentiment légèrement artificiel. Cela dit de nombreuses·eux ingénieur·es du son spécialisé·es dans l’enregistrement de morceaux classiques trouvent ce rendu plus musical. Donc il faudra rester vigilant·e lors du mix, car dans la plupart des captations A/B, si les micros ne sont pas panoramiqués aux extrêmes gauche et droite, de nombreuses annulations de phase risque de se produire entre les deux signaux. On perdrait alors un nombre de fréquences aléatoire qui nuirait au rendu sonore global en modifiant drastiquement le son de l’instrument (on appelle ce phénomène le filtrage en peigne). Dans tous les cas, lors du placement de la paire A/B il sera toujours judicieux d’effectuer une écoute de test en mono afin de vérifier que le rendu sonore global n’est pas altéré de manière trop importante.

La clef de la réussite ici sera de trouver la bonne distance entre les deux micros, parfois une quinzaine de centimètres suffisent, d’autres fois, il ne faudra pas hésiter à multiplier cette distance  par deux, trois, quatre ou cinq. Pour simplifier disons qu’entre quinze et quatre-vingt-dix centimètres sera la fourchette idéale dans la plupart des situations. Plus les micros seront éloignés l’un de l’autre, plus l’image stéréo produite sera large. Néanmoins un écartement excessif des micros pourra entraîner un effet de centre fantôme, c’est à dire un son de piano concentré sur chaque côté avec dans la plupart des cas les octaves graves positionnées à gauche et les octaves aiguës positionnées à droite (ou vice versa), mais surtout un manque cruel de substance au centre de l’image stéréo (avec des fréquences médiums creusées involontairement). Tu dois donc en priorité te poser la question de ce que tu cherches à reproduire : le point de vue de l’instrumentiste ou bien celui de l’auditoire. Une fois cette décision prise, et avec l’expérience, tu constateras probablement qu’un espacement supérieur à 1 mètre pose presque toujours ce type de problèmes (centre fantôme, image stéréo incohérente, mauvaise représentation des fréquences etc). Néanmoins, une solution envisageable pour contourner le problème du centre fantôme consiste à placer un troisième micro entre les deux micros principaux, et à finement doser sa présence lors du mix pour compléter l’image stéréo. Mais ici aussi, il faudra rester très vigilant·e face aux éventuels problèmes de phase entre chacun des trois micros, car ce type de placement peut prendre du temps pour être réalisé correctement, ce qui peut vite devenir un véritable casse-tête lors d’une séance et faire perdre patience à l’artiste. Rappelle-toi qu’en studio, chaque minute compte ! Comme nous l’avons écrit dans l’article précédent, se procurer de véritables micros omnidirectionnels n’est pas une mince affaire. Ces modèles sont rares et onéreux, tu pourras donc opter pour des micros à directivité variable qui possèdent un mode omni. Mais tu pourras aussi faire le choix d’utiliser des micros directionnels, à une condition : il faudra veiller à les placer un peu plus loin des cordes du piano pour obtenir une ambiance sonore similaire. Sinon tu risques de te retrouver une nouvelle fois face au problème du centre fantôme, mais en pire cette fois car ce type de micro captera essentiellement l’endroit qu’il vise. Pour peaufiner ta prise, effectue aussi plusieurs tests en modifiant leur inclinaison, surtout si tu utilises des modèles à petit diaphragme.

Paires stéréo coïncidentes X/Y et Blumlein

Techniques d’enregistrement : le piano - Partie 2 / Paires stéréo coïncidentes X/Y et Blumlein

Aussi belles soient-elles en stéréo, les prises A/B offrent rarement une compatibilité mono irréprochable. De plus, comme toutes les méthodes de captation stéréo : en fonction de l’instrument, de la pièce d’enregistrement et des modèles de micros à disposition, cette configuration peut parfois donner un résultat qui ne sera pas satisfaisant. Heureusement pour nous, il existe d’autres approches pour enregistrer un piano qui elles aussi, seront en mesure de produire une image stéréo immersive et ultra-réaliste : les paires coïncidentes. Ces méthodes consistent à rapprocher au maximum les diaphragmes des microphones afin que les artefacts d’annulation de phase soient négligeables lors de la sommation des signaux en mono (en pratique, « coïncident » signifie que les capsules des microphones doivent être placées l’une au-dessus de l’autre). Autre avantage, grâce à leur compatibilité mono quasiment irréprochable, tu pourras également obtenir un contrôle total de l’espacement stéréo lors de la phase de mix, simplement en utilisant les commandes de panoramique des deux pistes enregistrées. Pratique ! Avec ces techniques, la largeur de l’image stéréo captée sera proportionnelle à l’angle présent entre les deux capsules de chaque micro (ce qu’on appelle l’angle d’attaque) : plus cet angle sera important, plus l’image stéréo sera large et inversement. Cependant, au-delà de 130 degrés environ, un espace fantôme peut ici aussi apparaître au centre du champ stéréo. L’interêt principal des paires coïncidentes est d’ordre artistique d’une part, mais aussi d’ordre technique et pratique d’autre part, car elles nécessitent la plupart du temps des micros directionnels assez faciles à se procurer, en lieu et place des micros omnidirectionnels trop souvent hors de portée du grand public.

Dans le cadre d’une configuration X/Y standard, une paire de micros cardioïdes ou hypercardioïdes est positionnée avec un angle d’attaque de 90°. C’est un excellent point de départ et comme nous l’avons vu précédemment, tu pourras expérimenter en faisant varier l’angle d’attaque pour obtenir une image stéréo plus élargie ou au contraire, plus resserrée. Dans le cadre d’une configuration Blumlein standard (inventée par l’ingénieur Alan Dover Blumlein), tu garderas exactement la même disposition mais tu opteras pour des micros bi-directionnels (des micros à ruban seront un excellent choix ici). Fais bien attention lors de ton placement au fait que les micros ne se touchent pas, car cela pourrait provoquer des bruits mécaniques indésirables (comme un léger frottement des grilles qui protègent les capsules et qui ruinerait la prise). Pour aller plus loin il existe une troisième option, la technique Mid/Side (M/S), qui permet d’utiliser des micros omnidirectionnels cette fois. Elle offre également la possibilité de contrôler la largeur stéréo de ton enregistrement sans modifier la configuration des micros, ce qui est très pratique lors du mix. Mais pour y parvenir, tu auras besoin d’une matrice M/S et c’est un sujet que nous traiterons plus tard.

Conclusion

Nous espérons que cet article t’a plu, n’hésite pas à lire ou à relire notre série d’articles concernant les techniques d’enregistrement : Techniques d’enregistrement : la batterie / niveau débutant et intermédiaire, Techniques d’enregistrement : la batterie / niveau intermédiaire et avancé, Techniques d’enregistrement : les percussions traditionnelles et bien sûr Techniques d’enregistrement : le piano – Partie 1. Pense à partager ton point de vue et tes expériences sur la captation du piano avec la communauté dans les commentaires, c’est en échangeant ensemble que nous continuerons tous à progresser.

Dans un prochain article, nous aborderons les configurations stéréo pseudo-coïncidentes et nous te présenterons nos recommandations de micros pour t’aider à te constituer ton parc personnel en fonction de tes objectifs. D’ici là, l’ensemble de l’équipe gearnews.fr te souhaite d’excellentes fêtes de fin d’année. La suite au prochain épisode !

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