Test : Native Instruments Odes
Une ode aux rythmes pour la musique à l'image ?

Sommaire
Introduction
Le nouvel instrument Kontakt produit par Native Instruments en collaboration avec l’éditeur Evolution Series se présente comme une banque de son ready-to-play. Elle sort aujourd’hui dans la continuité des instruments Lores et Fables (d’ailleurs les trois sont réunis dans un bundle pour l’occasion), avec pour objectif d’offrir une palette sonore originale pour la composition de musique à l’image. Mais là où ces deux derniers se concentraient sur des sonorités atmosphériques et orchestrales, Odes se propose plutôt d’apporter des phrases rythmiques et des sons individuels joués avec des instruments traditionnels venus du monde entier. L’équipe de gearnews.fr a passé l’instrument au crible pendant plusieurs jours de test afin de savoir de quoi il en retourne, c’est parti !
Une sélection originale

Avant même de commencer, l’élément le plus important à noter en prélude est bel et bien la sélection d’instruments proposés ici. Avec une équipe de musien·ne·s et de sound designers comptant plus d’une dizaine de personnes très expérimentées, les deux marques ont souhaité apporter un vent de fraîcheur sur le segment ultra saturé des banques de son. Et de ce point de vue, il faut reconnaître que c’est une réussite. L’ensemble d’instruments proposé regroupe non seulement une flûte alto, une clarinette basse, un violoncelle, une contrebasse, mais aussi un morin khuur, une vièle à roue, un kamânche, une nyckelharpa, des pads divers et variés (synthétiseurs, voix etc), une flûte de pan, un shakuhachi, une flûte tenor, un saxophone tenor, une vièle basse, une vièle tenor et une vièle soprano. Ces instruments mériteraient à eux-seuls une présentation très détaillée, tant leurs origines et les différentes cultures musicales auxquelles ils sont liés sont riches, et malheureusement trop souvent méconnues dans nos contrées. Alors prenons quelques instants pour décrire ceux qui pourraient t’être encore inconnus : le morin khuur (aussi appelé vièle à tête de cheval / Horse Fiddle) est un instrument à 2 cordes frottées, accordées en quarte ou en quinte, originaire de Mongolie ; la vièle à roue est aussi un instrument à cordes frottées mais doté d’un clavier, et cette fois au lieu d’un archet c’est une roue en bois activée par une manivelle qui excite les cordes, son origine remonterait vraisemblablement à l’Allemagne du douzième siècle ; le kamânche (aussi appelé vièle à pique) est encore une fois un instrument à cordes frottées, d’origine iranienne, dont la particularité est que ce n‘est pas l’archet qui tourne autour du chevalet mais bel et bien le chevalet qui tourne autour de l’archet (grâce à la pique en contact avec le sol) ; la nickelharpa s’apparente à une vièle à roue d’origine suédoise cette-fois ; le shakuhachi est une flûte en bambou de confection japonaise etc. En résumé, c’est une version alternative d’un ensemble classique qui est proposée ici, où chaque pupitre de cordes est remplacé par un cousin éloigné venu du bout du monde.
Autre gros point fort, le mélange des timbres est exemplaire et très harmonieux. Après tout, on aurait pu craindre que certaines sonorités se mélangent mal entre-elles, mais il n’en est rien. On comprend très vite que tout a été pensé pour fonctionner ensemble : à la manière d’un orchestre, chaque timbre se complète avec le suivant. L’atout majeur des banques de sons est avant tout d’offrir aux musicien·ne·s la capacité de composer et d’arranger avec des sonorités de haute qualité auxquelles ils n’auraient pas accès facilement (voire pas accès du tout), et force est de constater que c’est une mission parfaitement accomplie ici. Le travail de sélection, non seulement des instruments, mais aussi des musicien·ne·s capables de les jouer, a forcément dû être colossal : le fruit de plusieurs dizaines d’années de travail concentrées dans un outil immédiat, mais surtout toujours très musical et efficace pour l’utilisateur·rice assis·e devant son ordinateur. Mais en parlant d’efficacité, passons l’interface graphique en revue.
Une interface simple mais puissante

L’interface graphique est extrêmement claire et facile d’accès, sur la page principale, l’écran central est organisé autour de 3 lecteurs de samples combinables, et chaque lecteur peut héberger un instrument mutli-samplé différent. On retrouve ici un des points forts de l’éditeur Evolution Series, réputé pour proposer des sonorités riches et complexes au sein d’interfaces très lisibles, qui invitent à la manipulation des sons sans jamais rentrer dans une quelconque complexité. Ici, pas d’overdose de menus ou de pages de réglages, on a accès à tout en direct et en un seul coup d’oeil. On sent que l’instrument a été pensé en priorité pour faire de la musique, et matérialiser des idées très rapidement.
À ce titre, Odes propose aussi un système de gestion et de mélange des prises microphoniques très bien pensé : il suffit d’effectuer un simple cliquer-tirer sur l’une des icônes triangulaires pour affiner le placement des sons dans l’espace. Au final, on peut positionner chaque son de manière vectorielle sur une combinaison d’axes X et Y, plus loin, plus près, à gauche, à droite etc. Cette possibilité est permise par différentes combinaisons de micros utilisées pour capter chaque instrument, à différents endroits du studio. Ces combinaisons ont ensuite été traitées pour éviter les problèmes de phase et encore une fois, nous avons été très agréablement surpris par la qualité sonore et les possibilités de narration musicale que ces déplacements dans l’espace pouvaient apporter. À cela s’ajoute un module de réverbération à convolution pratique mais très limité avec un seul et unique contrôle pour doser la quantité d’effet appliqué. Tu noteras aussi la présence d’un paramètre noise, mais contrairement à ce que son appellation pourrait laisser penser, il ne s’agit pas d’un générateur de bruit mais bel et bien de samples additionnels de l’ambiance et des bruits de la pièce, enregistrés pendant les performances des musiciens. Pour l’anecdote, ces enregistrements ont été effectué avec des micros et des placements variés, et confèrent tous un je-ne-sais-quoi de réalisme supplémentaire fort appréciable, en option. Enfin, les paramètres boost et power correspondent respectivement à un égaliseur Tilt et à un compresseur simplifiés (trop simplifiés sans doute), pensés pour retravailler légèrement le rendu de chaque sonorité.
De nombreuses articulations

Sur la page secondaire, on retrouve chaque instrument présenté avec un ensemble de plusieurs dizaines d’articulations différentes : des trilles, staccati, glissandi, tongues, swirls, des notes maintenues etc. Le tout dans plusieurs déclinaisons d’intensités et de longueurs. Bref, il y a vraiment de quoi s’amuser pendant longtemps et apporter beaucoup de nuances différentes. C’est important de le faire remarquer car souvent, les banques de sons présentes sur le marché proposent une poignée d’articulations principales mais on peut vite se retrouver coincé en pleine composition, en particulier pour la musique à l’image qui s’applique à ré-employer des thèmes musicaux à différentes intensités pour renforcer la dramaturgie du film, de la série ou du documentaire tout au long du visionnage. À ce titre, Odes est bien entendu compatible avec les contrôleurs qui disposent de l’aftertouch polyphonique, ce qui s’avère être très utile pour déployer un maximum d’expressivité et faire évoluer chaque articulation.

Enfin, pour chaque instrument sélectionné, on peut choisir d’utiliser 3 articulations en simultané, chacune disposant de ses propres paramètres de contrôles : Volume, Pan, Pitch, Attack, Release, accompagnés d’un filtre multimode résonnant. Naturellement, on aurait aimé ici aussi avoir un peu plus de contrôles à disposition, notamment sur les segments de l’enveloppe (avec un segment Decay et un segment Sustain par exemple), mais ce petit inconvénient est facilement contournable en sélectionnant d’autres articulations pour un même instrument. On reconnaît aussi assez facilement la patte de Native Instruments sur la qualité de l’algorithme du filtre multimode, qui sonne lui aussi très bien, même à résonance élevée.
Conclusion
Tu l’auras compris, nous avons été conquis par ce nouvel instrument Kontakt, la sélection et l’harmonisation des timbres, la pléthore d’articulations, la qualité sonore des différents enregistrements et des effets embarqués, l’expérience utilisateur face à l’interface graphique, tout est fait pour pouvoir écrire et arranger de la musique rapidement et sans compromis. Bien entendu, aucun instrument n’est parfait et on aurait aimé ici ou là quelques options supplémentaires, notamment en ce qui concerne le niveau d’édition des instruments et des effets. Mais après tout, chaque utilisateur·rice de DAW possède déjà un ensemble conséquent d’effets additionnels dans son logiciel hôte, donc rien ne t’empêchera d’en ajouter au besoin.
Au final, plus qu’une banque de sons, Odes se présente comme une véritable invitation au voyage, mais aussi comme une bibliothèques de témoignages sonores que nous aurions tort de laisser tomber dans l’oubli, sans parler du support d’apprentissage que représente cette banque pour les amoureuses et amoureux d’instruments acoustiques. Alors si jamais tu recherches des sons originaux pour tes compositions, tout en souhaitant obtenir un rendu de qualité professionnelle, n’hésites pas à passer quelques heures avec Odes et partages ton expérience avec la communauté dans les commentaires. La suite au prochain épisode !
Caractéristiques techniques
- Type : banque de sons Kontakt/Kontakt Player
- Espace disque requis : 57 Go
Compatibilité et tarif
- Disponible aux formats Kontakt et Kontakt Player au prix de lancement de 149 € (au lieu de 199 €).
- Bundle Lores + Fables + Odes disponible au prix de 399 €.
Les plus
- La sélection des instruments
- Les nombreuses options d’articulation
- La qualité sonore des enregistrements et des effets embarqués
- Le système de gestion des micros
- L’interface graphique utilisateur
Les moins
- Le prix légèrement élevé
- Le niveau d’édition des sons et des effets parfois limité
- L’espace disque requis (57 Go)
