Techniques de mix : égalisation / niveau intermédiaire et avancé – Partie 2
Comment bien démarrer ton mixage ?

Après le chapitre consacré à la relation entre la basse et la grosse caisse, aujourd’hui nous continuons ensemble notre progression vers les techniques d’égalisation avancées en nous intéressant de très près aux voix et aux guitares en tous genres. En préambule, n’hésites pas à lire ou à relire notre articles précédents concernant les techniques d’égalisation : Techniques de mix : égalisation / niveau débutant et intermédiaire et Techniques de mix : égalisation / niveau intermédiaire et avancé – Partie 1. C’est parti !
Sommaire
Introduction
Inconstestablement, la voix et la guitare sont les deux éléments les plus importants de la musique vivante moderne. Qu’il s’agisse de pop, de hiphop ou r’n’b, de rock ou de funk, obtenir un son de voix lead et de guitare de haute qualité sera toujours la clef d’un morceau réussi et apprécié par le public.
Mais paradoxalement, lors de la phase de mixage, la voix lead et la/les guitares sont aussi les pistes les plus faciles à travailler car nos oreilles sont habituées à la manière dont elles doivent sonner. Ainsi il est souvent très facile pour une·un ingénieure·eur du son de prévisualiser dans son esprit le résultat final et l’image sonore qu’il souhaite obtenir pour ces deux éléments. Bonne nouvelle !
Rappel des fondamentaux

Avant d’attaquer, commençons par un rapide résumé des principes fondamentaux que nous avons parcourus jusqu’ici. Pour rappel, lorsque tu désires améliorer le son d’une piste et la rendre plus intelligible, privilégies toujours l’atténuation d’une ou plusieurs plages de fréquences (l’égalisation soustractive). En revanche, si tu veux plutôt modifier et transformer le son d’un instrument, privilégies alors l’amplification d’une ou plusieurs plages de fréquences (l’égalisation additive). En ce qui concerne les réglages de l’égaliseur, utilises un facteur Q (largeur de bande d’égalisation) plutôt étroit si tu cherches à atténuer une plage de fréquences et à l’inverse, utilises un facteur Q plutôt large si tu souhaites amplifier une plage de fréquences.
Quand ton objectif est de faire ressortir un élément du mixage, commences par essayer d’atténuer légèrement les fréquences basses de cette piste, et/ou d’augmenter ses fréquences médium-aiguës. Mais si au contraire, ton objectif est plutôt que cet élément se fonde dans le mixage, alors atténues légèrement ses fréquences aiguës. Ensuite, si le rendu d’une piste ou d’un groupe de pistes sonne de manière cartonnée et imprécise (« muddy »), essaies d’atténuer la zone de fréquences située autour de 250 Hz. À l’opposé, si le rendu d’une piste ou d’un groupe de pistes sonne de manière nasillarde et creuse, essaies d’atténuer la zone de fréquences située autour de 500 Hz. De plus, lorsque tu as affaire à des notes sifflantes, des consonnes plosives ou des résonances agressives et désagréables, essaies d’atténuer le groupe de fréquences correspondant, souvent entre 2 kHz et 4 kHz (mais aussi parfois aux alentours de 6 kHz, 9 kHz et 12 kHz). N’oublies pas que l’égalisation est à la fois un outil de création et une arme de destruction : on ne peut pas amplifier un signal qui n’est pas présent à l’origine, ni complètement sauver une prise ratée ou de trop mauvaise qualité. Enfin, rappelles toi que les astuces et conseils liés à l’égalisation sont spécifiques à chaque instrument ou voix et que les fréquences indiquées restent des approximations qui varieront toujours un peu en fonction de l’artiste, de l’instrument, de l’environnement et du morceau.
L’égalisation des voix

Traiter une voix chantée ou parlée n’est pas une mince affaire, c’est souvent l’élément central d’un mixage et de fait, tu n’auras pas le droit à l’erreur. Ainsi il faut y porter une attention toute particulière et ne pas hésiter à questionner l’artiste ou la·le productrice·eur sur le rendu sonore qu’elle·il attend. Demandes leur de te donner des morceaux de référence piochés ici ou là sur de beaux albums qu’elles·ils apprécient pour te faire une idée précise de l’objectif final à atteindre. Mais attention, parfois certaines·ains artistes vocaux veulent obtenir un rendu qui n’est pas réaliste par rapport à leur timbre de voix ou leur performance. C’est ici qu’intervient la dimension relationnelle et psychologique d’une·un ingénieure·eur de mixage, et parfois tu devras savoir faire preuve de pédagogie et expliquer pourquoi cet objectif n’est tout simplement pas atteignable, sans les décourager pour autant !
Passons à la pratique : en ce qui concerne les voix, augmenter légèrement la plage située entre 125 Hz et 250 Hz permet en général d’accentuer l’épaisseur d’une prise, en mettant l’accent sur ce que certains appellent le son de poitrine, précisément là où se situent les notes fondamentales de la voix. Encore une fois, adopte une courbe d’égalisation plutôt large (facteur Q) et restes conservateur sur le niveau d’amplification. Parfois, 0,5 dB suffisent amplement pour changer la perception d’une voix et on ne dépasse que très rarement les 2 ou 3 dB d’amplification (sauf si tu cherches à créer un effet spécial temporaire et particulier dans le morceau bien évidemment). Ensuite, pour créer une sensation d’intimité et donner aux auditeurs l’impression que la voix est au premier plan, très proche d’eux, n’hésites pas à accentuer légèrement la zone située entre 1,5 kHz et 5 kHz (tout en restant très vigilant à ne pas amplifier involontairement les résonances agressives qui se trouvent aussi dans cette plage de fréquences, notamment les consonnes « s », « x », « t » et « p »). Pour profiter du meilleur des deux mondes, tu peux aussi combiner l’utilisation d’un égaliseur classique (pour augmenter cette plage si délicate à traiter) avec un plugin d’égalisation dynamique qui servira à atténuer les fréquences désagréables au cas où elles surgissent de façon intempestive et non désirée. À ce titre, nous te conseillons les excellents plugins Waves F6 Floating-Band Dynamic EQ ou FabFilter Pro-Q 4 si tu souhaites t’équiper avec des outils connus et reconnus pour leur qualité sonore professionnelle. Pour terminer, n’hésites pas un instant à filtrer les fréquences infra-basses complètement inutiles ici et a booster les fréquences aiguës (avec conservatisme et parcimonie) pour ajouter de l’air et finir de placer la voix au premier plan du mixage.
L’égalisation des guitares

Les guitares sont un cas assez particulier, et la méthode pour les traiter variera grandement en fonction du style de musique pratiqué. En effet, comme tu t’en doutes on n’égalise pas de la même manière une cocotte funk en son clair ou des « power chords » de gros metal qui tâche. Malgré tout, on peut quand même définir quelques règles de base qui t’aideront à faire sonner les grattes de la plus belle des manières. Tout d’abord, comme tu le sais, la tessiture utile d’une guitare accordée en tuning standard (E,A,D,G,B,E) démarre aux alentours de 80 Hz. En fonction du style, ce n’est pas une raison suffisante pour filtrer le tout trop strictement, et donc supprimer toutes les fréquences inférieures (on pense par exemple aux soli de jazz et de soul où les notes fondamentales de la guitare ont toute leur place) mais par contre, c’est une bonne raison pour les atténuer à l’aide d’une bande d’égalisation en plateau et ainsi laisser l’espace nécessaire à la basse. En effet, le combo guitare / basse est tout aussi important que le combo basse / batterie et tu dois toujours garder à l’esprit que ces pistes doivent bien fonctionner ensemble.
En pratique, essaies toujours d’égaliser tes pistes de guitare pour améliorer le rendu de l’instrument et t’assurer que toutes les cordes soient bien audibles. Par exemple, amplifier les fréquences bas-médiums entre 250 Hz et 2 kHz de quelques décibels (entre 3 dB et 6 dB) permettra à l’instrument de se détacher dans le morceau, et d’obtenir un rendu riche en harmoniques sans être trop brillant non plus. Cette approche, combinée à un placement panoramique judicieux te permettra de donner à la guitare toute la place qu’elle mérite sans jamais obstruer les pistes qui pourraient potentiellement entrer en conflit avec elle, telles que les voix ou les claviers en l’occurence. En cas de résonance agressive et stridente, tu trouveras probablement la fréquence fautive quelque part entre 2 kHz et 4 kHz alors n’hésites pas à la corriger, toujours avec un niveau d’atténuation progressif et un facteur Q resserré. Cette plage de fréquence est assez sensible sur les guitares et il faut veiller à ne pas trop la mettre en retrait non plus au risque de se retrouver avec une sonorité étouffée qui manque d’intelligibilité, de clarté et de définition. Ensuite, si la guitare est un élément fondamental du morceau (comme dans le rock ou le heavy metal), tu peux aussi la mettre en avant et lui donner beaucoup plus de présence et de poids en accentuant la plage située entre 4 kHz et 8 kHz. Aussi, dans le cadre d’une performance acoustique épurée, comme dans la folk ou le flamenco, tu peux parfois avoir besoin de mettre en exergue le bruit des doigts et de leurs mouvements sur les cordes. Pour y parvenir, c’est très simple, augmentes les fréquences situées au deus de 10 kHz par paliers de 3 dB jusqu’à obtenir le rendu sonore souhaité.
Conclusion
Au final, l’égalisation des voix et des guitares est assez simple d’accès mais nécessite beaucoup d’expérience pour achever un résultat professionnel. Encore une fois, tout dépend de l’esthétique musicale que l’artiste souhaite défendre et du coup, tu ne devras pas hésiter à remettre en question ta méthode à chaque fois qu’un nouveau mixage se présentera à toi. En réalité, il n’existe pas de recette miracle pour réussir une égalisation parfaite mais seulement quelques principes fondamentaux qui t’aideront à démarrer de la meilleure des manières. Ensuite, seules une écoute attentive et une idée précise de l’objectif à atteindre pourront te guider. Alors fais confiance à tes oreilles et n’oublies pas : si ça sonne bien, c’est que c’est bien !
Nous espérons que cet article t’a plu et qu’il t’a permis d’avancer encore un peu plus loins dans ta progression. N’hésites pas à nous poser des questions dans les commentaires, nous serons ravis d’y répondre. Et comme toujours, prends le temps de partager ton opinion et tes techniques personnelles concernant l’égalisation des voix et des guitares avec la communauté dans les commentaires. C’est en échangeant ensemble que nous pourrons continuer à affiner nos mixages et à proposer des morceaux de plus en plus beaux à écouter. Bientôt, nous aborderons les vastes sujet de la compression et des effets, et nous verrons comment insuffler de la puissance, de la dimension et des sensations d’espace inédites dans nos sessions. En attendant, n’hésites pas à lire ou à relire les articles Techniques de mix : les balances, Techniques de mix : panoramique, Techniques de mix : égalisation / niveau débutant et intermédiaire, Techniques de mix : égalisation / niveau intermédiaire et avancé – Partie 1. La suite au prochain épisode !
