As-tu besoin d’autant de matos musical? Oui, mais choisis intelligemment!
On a beau s’appeler GearNews, notre équipe de rédaction fait toujours très attention au matériel qu’elle acquiert. Avoir un studio rempli de super jouets et de joli matos pour composer, oui, on adore ça! Mais jamais au détriment de la créativité ou du workflow. Tu as besoin d’outils inspirants et musicaux pour faire de la musique (oui c’est le but!). On te donne donc nos tips pour éviter le syndrome du GAS et n’acheter que des pépites pour ton setup. Go!
Sommaire

GAS (nom masculin): Gear Acquisition Syndrome, ou en langue de Molière, syndrome d’acquisition (compulsif?) de matériel musical. Rassure-toi, cette maladie exotique n’est jamais mortelle et n’affecte qu’un petit pourcentage de la population de musicien·ne·s. Ouf!
Elle désigne la tendance que peuvent avoir certain·e·s musicien·ne·s, notamment les guitaristes (on les voit, vos 17 pédales mensuelles!), à acheter très régulièrement du matériel musical. En soi, ce n’est pas un problème. Certain·e·s grand·e·s artistes comme Trent Reznor ou Lisa Belladonna sont accrocs à l’achat de matos et ça ne les a pourtant pas empêchés de sortir de nombreux albums incroyables au fil des années. Au contraire, cette profusion de matériel est devenue leur signature sonore et scénique, puisque ces artistes ont investi énormément de temps dans leurs machines pour proposer un sound design riche et innovant sur leurs albums.
Mais alors, quand est-ce que la quantité de matériel commence à devenir un problème pour le·a musicien·ne moderne? Et bien tout simplement quand tu passes plus de temps à acheter et revendre ton matériel qu’à faire de la musique ou que le nombre de chansons que tu sors diminue drastiquement au profit d’interminables soirées de blips et blops, passées à tourner de nombreux knobs. Attention, la recherche sonore et la non-productivité sont essentielles pour développer son son… il faut juste bien doser ces phases!
C’est ok d’acheter plein de matos… à une condition!
Acheter le bon matériel peut changer ta pratique musicale. Je vais prendre l’humble exemple de ma personne. Séquence émotion: en mars 2024, j’ai acheté un Nord Stage 3, un piano de scène proposant de nombreux sons de pianos et synthés, la possibilité de les superposer ainsi qu’un workflow sans latence me permettant de rapidement changer de son quand je chante sur scène.
Et bien, ce « petit » piano est devenu de loin la pièce centrale de mon setup: il me permet de programmer mes sons bien plus rapidement qu’avec mon ancien contrôleur MIDI, de m’affranchir d’un ordinateur sur scène, d’avoir plusieurs sons par morceaux… bref, il m’inspire et me simplifie la vie. Propose-t-il plus de sons qu’une fantastique bibliothèque de plugins comme Analog Lab? Non. Propose-t-il de meilleurs sons de synthés qu’un Moog bien gras? Non plus. Mais pour mes besoins, à savoir avoir tout un panel de sons de claviers et synthés de bonne qualité facilement agençables, il est parfait!
Ce que tu dois donc retenir de ce rapide exemple, c’est qu’il ne s’agit pas d’avoir le plus de matériel possible ou le meilleur matériel dans sa catégorie… mais simplement le matériel le plus adapté à tes besoins. Peut-être que le Nord est parfait pour moi… mais peut-être que tu auras besoin d’un synthé plus farfelu pour un projet trip hop, d’un clavier plus petit, car tu n’es pas claviériste ou que tu préfèreras un contrôleur plus généraliste comme le Push 3 pour gérer tous tes projets et samples Ableton?
Note quels sont tes besoins et effectue tes recherches Google en fonction de ceux-ci, pour avoir un vrai plan d’attaque!
Choisir le matos adapté à tes objectifs et de ton style
Si tu fais des reprises d’Ed Sheeran à la guitare acoustique ou si tu as un projet d’ambient sans DAW qui repose uniquement sur du modulaire et du génératif… tes besoins ne seront évidemment pas les mêmes. Chaque style comporte des exigences et des contraintes matérielles… mais tous les setups sont possibles.
Prenons nos deux exemples « opposés » mentionnés plus haut: la performance acoustique d’un côté et le projet électronique de l’autre côté. Ce n’est pas parce que tu es un·e guitariste seul sur scène que tu ne peux pas avoir la folie des grandeurs.
Quelques recommandations insolites pour tes sets acoustiques
Pourquoi ne pas donner une petite touche d’électro ou hip-hop avec une boîte à rythmes simpliste?


Ou alors, incorporer un peu de live looping dans tes performances, en utilisant des pédales de boucle plus ou moins complexes?








Si tu aimes les effets ambiants un peu foufous, un H90 d’Eventide peut être une manière inattendue d’habiller ta guitare et ta voix avec un seul effet…


Dans un budget bien plus raisonné, un simple bottleneck ou un capodastre peuvent te donner bien plus de possibilités sonores ou harmoniques pour ton set…




Et pour les fans de modulaire?
Pour la partie Eurorack, je ne ferai pas l’affront de prétendre aux initié·e·s que j’ai des conseils à leur prodiguer! Je sais simplement que c’est un domaine où il est possible de se perdre très rapidement face à la diversité du matériel disponible, son prix, mais aussi la complexité d’utilisation. Peut-être que, dans ce cas-là, tu peux penser « comme un guitariste » acoustique et essayer de limiter la cadence d’achat de tes modules et te demander réellement « quel est mon son signature? », « est-ce que ce nouveau module fonctionne bien avec mon setup actuel? ». Ce genre de question te permettra de rester concentré et axé sur la créativité.
Mais si tu as besoin de recommandations en modulaire, n’hésite pas à nous le dire dans les commentaires. On serait ravi·e·s de te suggérer du matériel pour t’inspirer.
Le cas particulier de l’ingénieur·e son
Nous avons parlé des musicien·ne·s… abordons maintenant le cas des ingénieur·e·s du son, qui est légèrement plus compliqué. Lorsque l’on est ingé, on cherche en général à s’adapter au plus grand nombre d’artistes possible. On peut bien évidemment se spécialiser ou volontairement ne pas travailler sur certains projets mais par nature, le métier d’ingénieur·e son suppose d’avoir plus de matériel pour répondre aux besoins variés de tou·te·s les musicien·ne·s passant dans son studio.
On pourrait donc t’encourager à GAS-ser dans tous les sens? Eh bien pas vraiment! Oui, il te faut plus de matériel en tant qu’ingé, mais cela veut donc dire plus de dépenses et donc plus de risques pour ta structure. Il faut donc que tu priorises tes achats avec intelligence.

Si tu aimes ou vis principalement de l’enregistrement vocal de rappeur·se·s ou chanteur·se·s, peut-être qu’acheter un bon micro sera plus important dans un premier temps qu’acheter un kit de batterie haut de gamme… Mais en même temps, avoir une batterie à disposition peut aussi t’ouvrir les portes d’une nouvelle clientèle. Ah, quel dilemme!
Si tu es en plus de cela un ingénieur live, il faudra gérer encore mieux ton budget pour répartir tes achats entre tes divers sous-métiers. Acheter et monter en gamme oui, mais de manière organisée!
Prends le temps de bien tester et t’approprier ce que tu achètes
Attention au compte leboncoin saturé de matériel à vendre ou à l’abus du retour magasin, on te connaît très bien!
Évidemment, on peut parfois se rendre compte dès le déballage que ça ne va pas le faire et décider de renvoyer du matériel. Mais si tu entres dans cette spirale de renvoi de colis, tu vas perdre beaucoup de temps et d’argent à changer de matériel (en plus de consommer beaucoup de CO2 pour le transport!).
Quand tu reçois un nouveau jouet, passe du temps à le tester, à le connecter à ton matériel existant, à regarder des tutoriels, à le tester sur tes compositions ou projets en cours. Tout nouvel instrument ou matériel musical a sa courbe d’apprentissage. Si tu veux en tirer le meilleur, tu devras passer un peu de temps avec.
Comme le dit si bien mon ami compositeur Josh Madoff: « Le moment de l’unboxing est celui où tu es le plus nul avec le matériel que tu viens d’acheter. » Donne-lui donc un peu de patience et d’amour. Rome ne s’est pas faite en un jour! 🤌
Cas pratique: « je veux épaissir mon son en live et utiliser des bandes son/backing tracks »
Prenons un cas pratique pour nous mettre en situation… De ma modeste expérience, le·a musicien·ne français·e moderne est souvent confronté·e à ce problème suivant: comment puis-je sonner fat avec le moins de matériel (à transporter) et de personnes sur scènes possibles? Non pas parce que nous sommes asociaux ou peu musclé·e·s mais bien parce que depuis le COVID, le milieu du live est en crise, qu’il faut gérer son budget très intelligemment et pouvoir jouer dans le plus de salles et configurations possible.
Identifier ce que je veux vraiment
Sonner fat (gros, épais en anglais) peut avoir plusieurs sens selon ton projet. Voici quelques exemples:
- ajouter des bandes-son pour te rapprocher du son de tes chansons studio
- avoir des chœurs pour épauler la voix lead sans pour autant rajouter de choriste
- lancer des samples ou séquences liées au tempo de la chanson
- ajouter ponctuellement des couches de synthés (ou autres instruments) pour épaissir certaines sections
- …et il y a sûrement d’autres nombreuses définitions possibles de fat!
On voit déjà que, pour un même « problème », il y a plusieurs réponses ou solutions, supposant toutes du matos différent et surtout un workflow différent. Le piège principal que l’on cherche à éviter apparaît donc clairement: tu cours le risque d’acheter du matériel inadapté à ton utilisation, de te frustrer à l’utiliser, de perdre du temps, de l’argent, peut-être même d’abandonner ce que tu voulais faire à la base.
Mais alors, comment bien préparer ton achat et mettre toutes les chances de ton côté pour trouver la perle rare du premier coup? Voyons cela en revenant à notre exemple.
Lister mes besoins et contraintes
Admettons que, pour moi, sonner fat corresponde à la première option listée plus haut: « ajouter des bandes-son pour te rapprocher du son de tes chansons studio ».
Si je suis OK pour avoir un ordinateur sur scène et un métronome dans les oreilles pour synchroniser mes bandes-son à la musique, il vaudrait mieux investir dans une interface audio flexible qui me permet de faire des mixes casques différents pour les musicien·ne·s et/ou envoyer mes instrumentations en pistes séparées à l’ingénieur son façade. Dans ce cas-là, je vais essayer de chercher des interfaces audio avec au moins 5-6 entrées et surtout une dizaine de sorties flexibles.
Je sais aussi qu’une interface audio instable peut planter, et, comme c’est du direct, je ne peux absolument pas prendre ce risque. Je vais donc partir sur une interface à plus haut budget car cette interface est la pièce centrale de mon setup. Je peux rogner et économiser sur d’autres pièces d’équipements « moins importantes pour moi à ce moment donné » comme les pédales d’effet, les bagages ou les pieds de micro. Ces achats secondaires attendront.
Vérifier mes hypothèses en ligne et en magasin
Ne saute pas directement sur ChatGPT, même si c’est pratique. En plus de consommer beaucoup de ressources naturelles, il ne va pas forcément te donner la même compréhension poussée du matériel que tu aurais en écumant Google, en allant en magasin, en parlant à tes ami·e·s ou en regardant quelques tutos YouTube.
Faire son choix final
Après avoir croisé quelques sources, j’ai trouvé que la RME Fireface UCX II et la Motu Ultralite mk5 étaient réputées pour leur stabilité et la flexibilité de leurs options de routing. Après avoir regardé les spécifications techniques et quelques tests de presse professionnelle, je vois que la RME a l’avantage sur à peu près tout, car c’est du matériel haut de gamme. Néanmoins, pour du live, la qualité des préamplis de la Motu semble suffire et sa stabilité semble équivalente. Peut-être que je n’ai pas besoin de dépenser les 500€ supplémentaires pour cette utilisation?
Si au contraire, je veux également utiliser l’interface en studio et que je veux privilégier la longévité (certaines interfaces RME sont encore supportées par le constructeur plus de 20 ans après!), peut-être que la RME est un bon choix.




Conclusion
Bref! Je ne vais pas te détailler tous les exemples ou montrer tout le cheminement de pensée. Ce petit exemple de backing tracks live est uniquement présent pour te montrer que bien choisir son matériel, ce n’est pas forcément en acheter plus ou moins… mais c’est simplement plus réfléchir en amont de l’achat. Budgète, croise les sources d’information, teste, étudie le workflow pour voir s’il correspond à ta sensibilité.
En procédant méthodiquement comme cela, tu pourras faire grandir ton setup petit à petit sans accumuler les achats « inutiles » et sans te frustrer. Acheter plus de matos devrait être une source de plaisir et de créativité, pas une source d’agacement!
Si tu as besoin de plus d’astuces similaires ou de guides d’achat sur un thème donné, n’hésite pas à nous le dire en commentaire.
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